L’avenir de l’UX dans le e-commerce
A l’occasion des Journées Agences Ouvertes organisées par l’AACC, nous avons tenu une conférence sur le futur de l’UX dans le secteur du e-commerce. Nos deux intervenants, Pierre Minelli et Quentin Ledoux, psychosociologues et fondateurs de l’institut Metacom nous ont fait part de leur analyse sur les différents éléments jouant un rôle clé dans l’acte d’achat liés au design persuasif, tout en nous présentant leur dernier outil : 3D4Trust.

Ce qu’il fallait retenir de cette conférence :
Quels sont les tenants et les aboutissants de notre comportement durant l’acte d’achat ?
« Pourquoi vais-je acheter un mac plutôt qu’un PC ? (ou inversement )
Il y a une question de puissance, de carte graphique, de processeur, mais aussi d’image. L’image que j’ai du produit mais aussi l’image que le produit peut renvoyer de moi, nous sommes confrontés à des aspects rationnels et irrationnels.
Pour répondre plus précisément à cette question, nous allons parler aujourd’hui de design persuasif. C’est finalement de la psychologie sociale, appliquée au design.
Derrière un design, il y a une capacité à convaincre et à susciter un besoin chez l’utilisateur.
Nous pouvons parler d’incitation à l’achat ou utiliser d’autres termes comme l’influence positive ou négative.
La persuasion est une des clés du marketing, mais dégage également une image négative car faire du marketing, c’est nous inciter à acheter des produits dont nous n’avons pas vraiment besoin. Cependant le marketing peut également nous servir à choisir parmi une gamme de produit dont nous avons réellement besoin, et c’est là que la persuasion prend son sens. Le développement durable ou l’écologie sont par exemple des domaines dans lequel le marketing devient intéressant.
Pour le moment, concentrons-nous sur le design persuasif dans le e-commerce avec le cas Zalando.
En tant qu’UX designers, nous essayons de faire comprendre à l’utilisateur où il est et ce qu’il doit faire lorsqu’il navigue dans une interface. Beaucoup d’éléments rentrent alors en compte. Le nom du produit, le moment de navigation… Si je veux sortir du site, puis je le faire facilement ? Si je dois acheter une ceinture et que je suis sur une fiche produit sweatshirt, est-ce qu’un fil d’Ariane me permet de me situer dans ma navigation ?
Le produit est-il en stock ? Ma taille est-elle disponible ? Qui va me livrer mon produit ? D’où provient la livraison ?
Quelques exemples parmi tant d’autres des questions que l’on se pose.
Ce sont des informations assez classiques mais indispensables à analyser dans un audit ergonomique.
En termes de design maintenant, pourquoi la photo est-elle importante ?
Comment la photo peut-elle influencer le comportement ?

Nielsen, un grand penseur de l’UX Design a sorti une théorie qui nous montre que le regard de l’utilisateur dépend réellement de la direction du regard du modèle.
Sur la photo de droite un bébé qui nous regarde dans les yeux, sur l’autre, le bébé regarde le produit.
Lorsque le bébé regarde l’utilisateur dans les yeux, tous les regards sont concentrés sur lui alors que sur la deuxième photo la zone chaude se situe sur le produit.
Cette théorie s’appuie sur des tests d’eyes tracking qui font ressortir les zones froides et chaudes sur deux fiches produits identiques, ayant pour seul élément différenciateur, le regard du modèle.

Le regard est très important.
Notre regard va être naturellement attiré par le mannequin et par son regard, si le mannequin nous regarde, nous allons en oublier le produit.
Si le mannequin regarde vers les informations de la fiche produit, nous allons suivre son regard et consulter plus facilement ces informations.

Sur cette fiche produit, est ce que j’ai intérêt à amener l’utilisateur sur les tailles, le descriptif, le prix ? Ou encore sur une promotion vente flash ?
La réponse vous appartient.
Le regard peut également répondre à la question que beaucoup d’utilisateurs se posent : « Ou dois-je cliquer ? »
Ce type de pratique est simple, bien que nécessitant un travail en amont avec le photographe, et peut booster considérablement les ventes !
Les gens vont principalement en boutique plutôt que sur un site pour réaliser leurs achats, pourquoi ?
Un site, c’est froid, c’est statique, nous n’avons pas le contact avec le tissu ni la possibilité d’essayer le produit.
En boutique, le contact humain mais également le contact produit et l’immédiateté d’obtention du produit sont des éléments qui rassurent le client et le mettent dans un climat de confiance.
Afin de rassurer le client, des photos de mannequins « humains » peuvent contribuer à un sentiment de réassurance. De la même façon le fait de pouvoir se faire rembourser un produit s’il ne nous convient pas en fait partie. En combien de temps vais-je me faire livrer ? Le site est-il sécurisé ? Des réponses claires à ces questions auront également un rôle dans l’acte final d’achat.
Tout cela fait partie du design persuasif. Beaucoup de théories rentrent en jeu et fournissent des éléments indispensables au moment de l’élaboration ou de l’optimisation du parcours utilisateur.
Pourquoi parle-t-on de psychologie sur le web ?
La psychologie, c’est comprendre les mécanismes du comportement humain. Il y a un côté « manipulation » mais également un côté positif notamment sur une interface intuitive, moins nous prenons de décision, plus nous sommes heureux. Un chemin tracé conduit vers une navigation naturelle et ne nécessite aucun effort de la part de l’utilisateur pour réaliser son achat.
Notre Outil 3D4Trust :
C’est une échelle qui permet de faire un audit sur un site e-commerce en fonction de différents élément persuasifs. D’un côté, une liste des éléments persuasifs, de l’autre s’ils sont appliqués ou non. Rien qu’avec ces informations nous pouvons avoir un spectre complet et lister tous les élément manquants mais également tous ceux qui sont présents et les optimiser.
Nous pouvons analyser la structure du site, les éléments persuasifs, les éléments de réassurance, la preuve sociale : je suis devant deux restaurants, un plein, un vide, je vais manger ou ? de façon naturelle le fait qu’il soit plein va me faire croire qu’il est meilleur.
L’utilisateur va se fier à ses intuitions et ses expériences passées pour prendre sa décision.
Tous les sites que nous avons audités sont très loin de 100% mais la valeur de l’entreprise peut faire que certains éléments soient mis de côté, de part la réputation ou popularité de l’entreprise. Un leader comme Amazon n’a pas forcément besoin d’appuyer sur les éléments de réassurance.
Aujourd’hui, nous sommes arrivés à un constat, nous pouvons mesurer l’expérience proposée par un site.
Pour performer nos critères de mesure, nous avons audité l’ensemble des sites du Top 100 de la FEVAD.
En auditant ces 100 sites, nous avons pu dresser un benchmark d’expérience. Nous pouvons donc faire un état des lieux de ce que plusieurs concurrents directs font et proposer à une entreprise d’appuyer des leviers que ces concurrents n’ont pas utilisés.
Dans un avenir proche, nous pourrons comparer les expériences en fonction des produits et ajuster nos critères avec des best practices lors de la vente d’un t-shirt plutôt que sur un manteau par exemple.
La valeur de notre outil, c’est l’aide à la décision sur son site.
C’est-à-dire que le propriétaire du site connait déjà sa cible, il sait à qui il veut le vendre.
Maintenant il saura là où ça fonctionne, pourquoi, et comment améliorer ses points forts et corriger ses faiblesses. Après cet audit nous pouvons sortir un SWOT, avec les forces, faiblesses, opportunités, et menaces et même comparer son expérience à celui de ses concurrents.
Qu’est-ce que l’habituation ?
Nous sommes tous experts dans le domaine de l’habituation. Nous nous habituons à tout et nous nous adaptons aux pratiques existantes. Parfois nous nous habituons à des mauvaises pratiques et nous ne voulons pas changer nos habitudes.
Amazon par exemple impose ses règles en termes de design persuasif, on va trouver qu’un site comme Amazon est une référence car il fonctionne alors qu’il ne s’agit pas du tout d’une référence en termes d’expérience proposée.
Mais bien entendu et heureusement tout ne fonctionne pas par le design persuasif, la politique de prix rentre également en jeu ainsi que le marketing et les moyens alloués à la communication.
C’est pourquoi lors de notre audit nous prenons en compte tous ces facteurs et mettons les entreprises auditées en face d’entreprises du même niveau.
Pourquoi c’est une révolution dans le e-commerce ?
Nous savons dire ce qui va, ce qui ne va pas, nous mettons l’entreprise en face d’entreprises du même environnement. Nous sortons une checklist de 500 critères d’optimisation avec un état des lieux de ce que fait la concurrence. Nous proposons un plan d’action et ensuite le propriétaire du site à toutes les clés en main pour optimiser l’expérience qu’il propose avec la mise en place d’A/B testing par exemple.
L’avantage, c’est également que nous ne nous arrêtons pas au parcours sur site mais prenons en compte tous les éléments de contact entre la marque et l’utilisateur sur le web. (moteur de recherche, réseaux sociaux…).
Voilà comment nous appliquons le design persuasif sur les site e-commerce et il nous aura fallu 3 ans pour élaborer cet outil. »